samedi 1 avril 2017

Comment faire l'amour avec un Mormon dans l'espace

1/ Des journalistes en mal de copie écrivent un article sur les problèmes de la reproduction sexuée en gravité zéro.

2/ S'apercevant que les gens ne savent plus lire, ils en font un pdf filmé, en éliminant 95% des informations de l'article original.



3/ Je regarde pour me détendre voire m'évader une série de SF pas mal du tout qui s'appelle The Expanse mais que je ne parviens jamais à nommer correctement.
Je l'appelle spontanément The Escape, pour des raisons qui m'échappent. 
Mais c'est sans doute lié à ce besoin d'évasion.

4/ dans ce feuilleton d'anticipation situé dans un futur proche où l'épuisement de l’écosystème terrestre a donné lieu à l'établissement de colonies sur Mars et dans la ceinture d'astéroïdes de Jupiter pour y prélever des ressources qui se raréfient, et où les luttes d'ingérence menacent une paix déjà fragile dans le Système solaire, les Mormons font construire un vaisseau générationnel pour aller ensemencer la Galaxie de la Bonne Nouvelle diffusée par l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours.
Comme ils ont plein de sous, le vaisseau est sans équivalent dans l’univers connu, et suscite bien des convoitises.

Le Vaisseau des Mormons de l'Espace
(en construction)

5/ On assiste au début de la saison 2 à une torride scène de baise dans l'espace. 
C'est pas trop tôt. 
Je ne vous fais pas de GIF animé pour ne pas spoiler.
La gravité zéro ne semble pas les affecter beaucoup. 
Ca fait longtemps que les auteurs de SF ont résolu les problèmes sur lesquels sèchent les scientifiques. 
La Nasa nous prend pour des quiches, et Stephen Hawking est un branleur.

6/ Devant la gare, tous les matins je croise les Témoins de Jéhovah avec leur petit kiosque à revues à roulettes. On dirait une version un peu minable des Mormons de l’Espace. Ils ne semblent manifester aucun désir d'aller ensemencer quoi que ce soit. Ils sont là et ils attendent tranquillement le passant qui aura l'imprudence de s'adresser à eux pour leur demander où est la rue des Plantes, puis ils pondront leurs oeufs amers dans son ventre. Je n'ose pas leur demander le programme de leur candidat, ni s'il a donné une consigne de désistement pour le second tour de la présidentielle, j'ai peur de ne pas pouvoir m'en débarrasser. C'est arrivé à d'autres.
Le soir, c'est les Témoins d'Emmanuel Macron ou de Dupont-Aignan.

7/ Au moins, en lisant Space Sex is Serious Business, j'ai appris des trucs, même si je me doutais un peu qu’on n’était pas prêts de construire d’arche spatiale. Et en regardant The Expanse, j’ai rêvé d’un monde aussi pourri que le notre, mais en mieux. Un monde où on pourrait faire l'amour avec un Mormon dans l'espace, à condition de l’arrimer solidement, et que ses parents soient d’accord. C’est important, le rêve. Alors que quand je regarde les résultats de l’enquête statistique menée par l’Observatoire de la vie sexuelle des parisiens dans la ville-lumière où s’inventent aujourd'hui les modèles sexuels et amoureux de demain, ça ne m’inspire rien du tout.
C'est peut-être parce qu'habitant la province, je n’ai pas de pratiques anales avec ma voisine de palier, mais il faut dire qu’elle a 78 ans, et que son mari n’est pas très chaud pour que je lui froisse le col du fémur, mille putois.

[Edit]
Ma fiction est rattrapée par la réalité : j'apprends dès hier que les Mormons de l'Espace ont inauguré leur premier vaisseau spatial en France.
Bon courage pour le décollage.

dimanche 19 mars 2017

Comme un torrent

Dans la journée, je fais parfois des micro-siestes d'un quart d'heure.
Juste le temps que corps et cerveau se reposent et rechargent un peu les piles avant de repartir.
Dans un siècle où la productivité nous dicte sa loi d'airain, même si t'élèves des chèvres dans l'Aveyron parce que tu ne te reconnais plus dans la démocratie participative à la sauce Mélenchon, t'es quand même dépendant des cours du fromage de brebis, et faut assurer, en volume et en qualité.
La micro-sieste réussie dépend avant tout d'un accord profond avec soi et avec la nature de l'exercice, dans l'espace et le temps qui sont impartis. Ensuite, c'est de l'entrainement.
Le corps, c'est facile à repérer, il y a un engourdissement des membres.
L'esprit, lui, se met à produire des images hypnagogiques; chez moi c'est des grottes, des cours d'eau, des paysages.
Tout à l'heure, c'était clairement la mer, peu profonde, presque un rivage, de molles vagues. Du soleil.
Je me laisse partir, mais j'ai le support de la respiration, je ne vais pas très loin, et puis je reviens.
15 minutes aller-retour.
Impeccable.
Hier, j'ai raté mon coup, j'ai dormi 3 heures.
Mais j'ai un peu tiré sur la corde ces dernières semaines.
Tout à l'heure, au retour, j'essaye de préciser mon impression.
J'associe ça à des trucs que je connais.
Texture et transparence de l'air et de l'eau :
sans hésitation, la plage aux dinosaures marins dans Riven (la suite de Myst).


C'est de l'imaginaire, mais très réel. Ca fait bien 20 ans que je n'ai pas joué à ce jeu vidéo, mais cette plage cachée m'avait fait une forte impression, qui ressurgit dans l'état intermédiaire entre veille et sommeil.
Plus proche de moi, un torrent de Hautes Pyrénées, en 2014.
J'en fais vite un gif animé, ma lubie du moment.


Mais c'est trop dynamique. Mon bord de mer était bien plus tranquille.
Et l'image, même animée, de la chose n'est pas la chose.
Il y a aussi ce lac de montagne, qui traine dans mes dossiers photos, et dont la sérénité m'obsède jusqu'à la déraison.
Le désir du Nirvana, c'est le Samsara.


Destockage massif.
Changement de look de la perche à selfies.
Et maintenant, retour à l’essentiel, à savoir aller emprunter la scie sauteuse à Jean-Pierre pour agrandir la chatière que le Migou vient de péter pour la ixième fois tellement qu’il est gros, ce con de chat.

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Tout à l’heure, j’ai oublié de dire que tout cela m’est venu après que j’aie réussi cette semaine à faire changer l’éclairage basse tension de la cuisine, des spots jaunâtres au plafond qui s’éteignaient quand ça leur chantait, en général quand on était en train de préparer le repas. Le transformateur était en fin de vie, mais pour y accéder il fallait monter dans les combles, tapissés depuis deux ans d’une couche neigeuse de 50 cm de ouate de cellulose.
L’électricien craignait de s’y aventurer, bien que je lui aie assuré avoir survécu à l’expédition. Nous avions pris rendez-vous de longue date lui et moi, il devait entre-temps aller installer 45 automatismes de portails de temples bouddhistes dans le Sud Ouest, tout était planifié par un copain à lui, et puis que voulez-vous, le bouddhisme ne paye pas et il s’est heureusement rendu compte que son client n’était pas solvable avant d’attaquer le chantier, mais ça lui a fait une perte d’activité d’un mois entier, c’est raide pour un artisan.
Il est parvenu à m’installer un nouveau plafonnier en lumière blanche qui consomme 10 fois moins et éclaire 10 fois plus, ce qui a fait s’exclamer ma fille « maintenant quand on allume dans la cuisine on a l’impression d’entrer au Paradis », je ne serai pas aussi positiviste qu’elle parce que ce flux de lumière divine révèle surtout le manque d’étagères à épices à la Homer Simpson sur les différents plans de travail, mais au moins on voit ce qu'on fait et je risque moins de m'ouvrir la main en croyant ouvrir des huitres.
Et j'ignore pourquoi cette histoire de lumière divine est associé dans mon esprit à son équivalent acoustique, le long instrumental "Watermelon in Easter Hay" de Frank Zappa, mais c'est comme ça.



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Ca y est, je viens de comprendre pourquoi en l'écoutant de bon matin au bureau…
c’est à cause des paroles du morceau :

[CENTRAL SCRUTINIZER:]
This is the CENTRAL SCRUTINIZER...Joe has just worked himself into an imaginary frenzy during the fade-out of his imaginary song... He begins to feel depressed now. He knows the end is near. He has realized at last that imaginary guitar notes and imaginary vocals exist only in the mind of The Imaginer... and... ultimately, who gives a fuck anyway... So…mwa ha ha… Excuse me… So… Who gives a fuck anyway?... So he goes back to his ugly little room and quietly dreams his last imaginary guitar solo... 
(et ensuite commence le solo - torrent de miel sidéral sur la plage aux plésiosaures de Riven, mais ssiiii, la suite de Myst.)
Ce qui est tout à fait pertinent par rapport au sujet de mon article, si tant est qu’il existe ailleurs que dans mon imagination.
L’inconscient ne nous trompe jamais, même quand il nous plante.

samedi 11 mars 2017

La rigidité cadavérique des rhinocéros

Je voulais écrire un article sur l’absence tragique de littérature sur l’évolution de la rigidité cadavérique post-mortem des rhinocéros®, après avoir lu dans le Monde un article où le journaliste s'est visiblement amusé à déposer cette expression rien que pour je la ramasse et en fasse n'importe quoi, j'aurais réussi à relier ça façon explosifs artisanaux, le fil rouge sur le bouton rouge, avec la relecture attentive du dernier SAS, Coup de boule à Kaboul, l'affaire Le Troadec ("Une famille aurifiée") qui suit d'assez près l'affaire Dupont de Ligonnès ("Une famille terrassée") qui auraient accrédité la thèse alternative qui fait sans doute führer sur Twitter et qui veut que Nantes soit construite sur un ancien cimetière indien (je vois pas d'autre explication), et puis le prochain SAS sorti dès ce soir, Ramasse à Damas, et puis j'aurais fait quelques montage photoshop bien perraves, et puis finalement je suis assez occupé, et François Morel m'a pris de vitesse, lui dont c'est le métier. 'Culé. De toute façon, je n'aurais sans doute écopé que quelques commentaires décalés de mes trolls habituels, ce qui n'a aucun intérêt.





 Devant la pression internationale, Warsen arrête sa revue de presse.


Arrête, Warsen, tu nous fais trop rire.

dimanche 5 mars 2017

Fillon : La contre-attaque



Le figaro magazine, septembre 2015


Le figaro magazine, mars 2017

Je m'interroge : soit les rédacteurs du Figaro ont Alzheimer, soit ils pensent que leurs lecteurs sont salement touchés.

- Exercice de style et de probabilités : sachant qu’entre le shoot photo de 2015 et celui de 2017, François a déboutonné sa veste et s’apprête à dégainer un Colt Python 357 habilement dissimulé dans sa cravate, calcule toi-même la couverture du figaro magazine de 2019, sobrement intitulé : 
Fillon : La contre-attaque.
Ensuite, en t’aidant de Photoshop et d’images trouvées sur Internet, réalise toi-même cette couverture.
Les meilleures contributions seront publiées.

- Question subsidiaire : sachant qu’il va pleuvoir cet après midi, évalue le nombre de personnes qui manifesteront au Trocadéro en soutien au candidat à la présidentielle mais surtout contre les juges et la justice. 

- Question éliminatoire : on y verra sans doute Julie Graziani, porte-parole du mouvement l'Avant-Garde, collectif qui occupe le terrain des idées d'une droite très à droite, sans exclure, pour 2017, une alliance électorale avec les Républicains ou le Front national. 
Essaie de ne pas rire d'elle (ou de ne pas pleurer) entre 36’42’’ et 37’40’’ de cette vidéo.



Et n'oublie pas que le soutien à François reste le seul garant de ta rock'n'roll attitude dans ces moments douloureux pour la France.

samedi 4 mars 2017

Monstres froids, Méfaits du tabac & Persistance du Mal (6)

Allez, c'est reparti.
"Nouveau rebondissement dans l’affaire qui oppose Anders Behring Breivik à l’Etat norvégien. A la surprise générale, en avril 2016, la justice avait condamné Oslo pour le « traitement inhumain » du tueur néonazi en détention à l’isolement depuis cinq ans. Retournement de situation mercredi 1er mars, puisque la cour d’appel a infirmé ce jugement, estimant que M. Breivik n’était pas traité de manière « inhumaine » en prison."
Bon, faudrait savoir. 


En plus, l'avocat de Breivik a fait appel, ça va aller devant la Cour Suprême de Norvège, on n'est pas près d'être couchés, avec vos conneries.

Il faut en finir, comme le disait un p’tit nouveau sur un forum de pornodeps avant Jésus Christ. 

Il est vrai que lors du procès qu’il a intenté à l’Etat norvégienBreivik avait poussé le bouchon un peu loin : « Pour quelqu’un qui souffrait d’isolement et devait apparaître amoindri, Breivik avait, au contraire, terriblement bien préparé son coup, comme il l’avait déjà fait lors du procès du printemps 2012. Il a notamment profité au maximum de la tribune qui lui est offerte pour distiller à nouveau sa propagande fasciste. Un comportement prosélyte qui justifiait d’ailleurs largement selon Marius Emberland, le procureur, que Breivik soit maintenu à l’isolement.
Lors du procès, il avait soigneusement préparé ses interventions, tenant des discours qui avaient bien peu à voir avec des souffrances psychologiques liées à un isolement carcéral. Il a pu raconter qu’il se disait inspiré par le succès d’Aube dorée en Grèce, qu’il assurait renoncer à la violence politique et vouloir plutôt créer un parti. Il disait encore vouloir militer pour qu’un parti national-socialiste prenne place au Parlement norvégien et regrettait que les nazis soient discriminés dans son pays.
De quoi relancer le sentiment d’une manipulation diabolique qui met l’Etat de droit face à ses limites ultimes. « Mais c’est ainsi que fonctionne un Etat de droit indépendant, c’est aussi une partie inaliénable de l’Etat norvégien », écrit l’éditorialiste d’Aftenposten. Les juges n’ont pas entendu la plaidoirie du procureur pour qui ce n’était pas un homme brisé par l’angoisse de l’isolement qu’ils voyaient au procès, mais bien « le même narcisse idéologiquement dérangé que nous avions vu auparavant ». 
Il semble que les tenants de la thèse du narcisse idéologiquement dérangé aient eu gain de cause. A moins que les horticulteurs - producteurs de narcisses en pot portent plainte pour propos discriminatoires envers ce fier bulbe.
Breivik va pouvoir retourner sangloter sur son triste sort dans sa cellule de la prison de Skien, où il dispose de trois pièces : une chambre, une salle de sport, une salle de travail et de loisirs équipée d’une PlayStation et d’un ordinateur qui n’est pas relié à Internet. Toutes ses communications avec l’extérieur sont lues et filtrées. Breivik s'est aussi plaint de la qualité du café et des repas réchauffés au four à micro-ondes.

A ce stade, il devient difficile de ne pas haïr la Haine et les Haineux.
Rrrrhhôôôh le malhonnête. 
T'entends ça, manman ? 
Que de la gueule.

Il a un ego aussi démesuré que Docteur Etrange. Sauf que vers la fin du film, y'a le Grand Ancien (qui est une Ancienne, d'ailleurs, mais les Grands Anciens pèsent de plus de poids phallocratiquement symbolique que les Grandes Anciennes) qui vient révéler le Secret de l'Univers à Benedict Cumberbatch : 
"It's not about you."



Mais ça, Breivik n’a jamais pu l’admettre.

C'est pour ça qu'il est passé du coté de Dormammu et de la Mati%re Grasse Noire qui fait des Trous dans le Réel. 
Pour exister, avec sa pitite pulsion de mort en bandoulière.
Si on est amateur, il n'est pas mal, son Trou dans le Réel, pour un autodidacte : on a déjà pu enterrer 77 personnes dedans.
Et bientôt l'auteur de ce blog, parce que je commence à voir des Breiviks partout, et en particulier au Super U, d'où je reviens avec les courses de la semaine. Y'en avait un au rayon surgelés, et deux qui m'attendaient entre les croquettes pour chats et les produits d'entretien. 
Y m'ont rien fait. Heureusement, ça fait un moment que je n'ai plus l'air d'un Jeune Travailliste.
"Plus on fait attention à lui, plus ça lui donne de l'énergie, comme le fantôme affamé de Chihiro, dit un ami en parlant de quelqu'un d'autre, mais ça colle bien quand même. Si tu veux l'amener à réfléchir sur lui-même, il n'y a qu'une solution : faire comme s'il n'existait pas. Ce n'est pas un être humain, quelqu'un chose est entré en lui il y a longtemps, et maintenant cet être tient toute la place. Si tu veux l'aider, il faut cesser de nourrir cette chose."
La Norvège est condamnée à être emmerdée jusqu'au bout par Anders Behring Breivik.
Au mieux, il va rester au trou jusqu'à ce qu'on le mette dans le Trou. 
Dans le Réel.
Car selon la formule de Salman Rushdie, grand Saint de l'Islam, “Le monde est l’endroit dont nous prouvons la réalité en y mourant.” 
Mais pour Breivik, peut-être que l'Enfer, ce n'est qu'un feu de camp.
Va savoir.
Pour le happy end, voyez avec mes collègues, en particulier Latifa Ibn Ziaten, mère de la première victime de Mohamed Merah, dans son combat contre la radicalisation.


Alex + Ada
Sarah Vaughn, Jonathan Luna

(fin)

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Daniel Goossens, l'encyclopédie des bébés.
Je l'avais oublié, celui-là.

mercredi 1 mars 2017

Malfaisants, froids, persistants (5)

De retour de notre balade dans le Multivers (article précédent) il faut bien admettre, à défaut de l'accepter pleinement et inconditionnellement, que dans notre Uni-vers, Anders Behring Breivik est en prison après avoir commis l’irréparable. 77 fois.
(Je pars du principe optimiste que les blessés, réparables, ont été réparés, ou sont en passe de l'être, traumas psychologiques non inclus).
Kjirsten Fjord, la gentille secrétaire avec qui il aurait pu convoler à l’issue du Congrès d’été des Jeunes travaillistes sur l’ile d’Utøya, gît sous une couverture, déjà froide, du sang s’écoulant de ses oreilles.
J’ai vu les photos.
Elle a l'air abattue.
Froidement.
Comme les 76 autres Jeunes travaillistes qui ont eu la malchance de ne pas se cacher assez bien.
Ils n’avaient pas été assez attentifs aux leçons de vie de « How not to be seen ».
J’en profite donc pour renouveler à Breivik mes chaleureux encouragements à croupir longtemps en prison.
Jusqu’à sa mort, en fait.
Et si possible, que ses gardiens mettent « The Torture Never Stops » de Frank Zappa à donf et en boucle dans sa cellule(1).
Que le seul film disponible en téléchargement légal sur l’Intranet de la prison soit « Where the dead go to die », et que les sous-titres soient décalés.
Qu’il ne dispose pas du logiciel pour les resynchroniser.
Que quand il donne ses treillis militaires et ses Rangers à nettoyer au pressing de la prison, ils lui rendent à chaque fois une djellaba tachée et deux babouches de pied gauche.
Que…
Une minute.
J’ai déjà vu ce genre de réaction dans le film coréen « J’ai rencontré le diable».
Un flic traque le tueur en série qui a tué sa fiancée enceinte… et devient pire que lui. Bien pire.
Au cinéma, les Coréens n’ont pas de tabou avec la cruauté, mentale ou physique.
Le film devient assez vite inconfortable pour l’infortuné spectateur qui s’est laissé embarquer dans cette vengeance qui tourne mal, heureusement tempérée par un humour atroce. 
Dans les moments pénibles, il est conseillé de se rappeler que c’est du cinéma.
Avec Anders Behring Breivik, non, pas moyen. Il n'est pas conseillé de se rappeler que c'est réel, mais c'est réel quand même.
Il a eu une vie de merde, alors il a théorisé sur l’islamisation de l’Europe, et il s’est pris pour un Croisé.
Son Manifeste ressemble à un bouquin de Maurice G. Dantec (qui a fusionné avec le Grand Tout l'été dernier mais ça fait bien 15 ans qu’il avait commencé à breiviker, ou Breivik à dantequiser, ou tous les deux à houellebecquiser) encore plus mauvais que d’habitude, et après il a soigneusement préparé, planifié, puis exécuté son petit massacre.
Alors que peut-on en dire ?
Tous les matins, je pense à Anders Behring Breivik.
Je ne lui envoie pas de l’amour, ça non. J’ai déjà bien du mal à en envoyer dans un rayon de 1 mètre 50 autour de moi, alors pensez, atteindre la Norvège, ça serait un peu présomptueux.
Et puis c'est un peu tard. Fallait être là dans sa jeunesse. Avant que le ver ne dévore le fruit de l'intérieur.
Je me demande comment c’est, dans sa tête.
Je ne suis pas le seul.
La pièce manquante dans ce puzzle, c’est bien son absence d’empathie, sa faculté d’occulter le fait que ses cibles sont des êtres humains comme lui.
J’ai la chance de ne pas être le papa de feu Kjirsten Fjord.
Mais quoi d’autre ?
Entre gens civilisés, on peut parler du Mal.
On ne s’en prive pas.
« La tentation du Bien est beaucoup plus dangereuse que celle du Mal » nous disent les philosophes.
"C’est au nom de la morale, c’est au nom de l’humanité qu’ont été commis les pires crimes contre l’humanité. C’est au nom de la morale qu’ont été commis les pires crimes immoraux. Morale perverse, donc : on est moraux avec ceux qui partagent notre monde de représentation et on est pervers avec les autres parce que la définition de la perversion, c’est pour moi celle de Deleuze et de Lacan : est pervers celui qui vit dans un monde sans autre." nous dit l'abbé Cyrulnik.
Très bien.
Breivik utilise les méthodes des djihadistes qu’il prétend combattre, et devient comme eux.
Mais à part ça ?




Alex + Ada
Sarah Vaughn, Jonathan Luna



(1) "Des mouches vertes bruissent, dans ce cachot du désespoir
Des prisonniers geignant marinant dans leur pisse grattent leur tignasse noire
Une pâleur blafarde tombant d’un trou à des années lumières,
C’est leur lueur du jour, rien d’autre ne les éclaire
Et ça pue tellement que les pierres asphyxiées
pleurent un jus verdâtre de venin
Dans l’antre où brûle l’immense forge du Malin
et où la torture est sans fin
La torture est sans fin."

(à suivre)

lundi 27 février 2017

Monstres, tabac, Mal (4)

Résumé des épisodes précédents :

Dans un coin reculé du Multivers, au sein d'une réalité aussi alternative que les faits éponymes, Maurice G. Breivik n’a pas été abandonné à la naissance par son père, n’a pas été élevé par une mère dépressive qui, après un passage à vide, a retrouvé son équilibre intérieur grâce à la célèbre méthode d’épanouissement personnel « Méditer moins de 3 minutes par jour, c’est possible » popularisée par Christophe André.
Il n’est donc pas devenu un tueur de masse, mais un placide chef d’entreprise, qui fait juste un peu des blagues la nuit sur Internet avec son copain Marcelin Deschamps, parce qu’il trouve qu’il y a un peu trop d’Arabes en Norvège, et un peu trop d'étrangers dans le monde, si vous voulez le fond de ma pensée, mais après vous penserez à rabattre la lunette, sinon bonjour l'odeur.
En tissant patiemment sa toile sur le Web, il a fini par séduire Kjirsten Fjord, gentille secrétaire à la Ligue des jeunes travaillistes, en lui adressant une série de mails enflammés dont le thème principal, « Ma vie de Courgette (dans le frigo de ton coeur) » a porté la correspondance amoureuse à son point d’incandescence où elle con verge avec la littérature érotique, se jette sur elle, lui déchire tous ses habits et prétend après coup qu'elle était consentante, puisqu'elle n'a rien dit. 
A un tel point d'incandescence, d'ailleurs, qu'en recevant ses mails, Kirsten a dû éteindre son ordinateur à grands seaux d’eau claire, et s’est faite un peu gronder par Jean-Lük Mélenchønberg, le chef de la Ligue des jeunes travaillistes.


"Ma vie de courgette" a été adapté avec succès 
en film d’animation pour les petits et les grands, 
mais surtout pour les petits, quand même.

D’ailleurs Richard Millet l’a bien dit, « Breivik aurait pu être un grand écrivain, s’il n’avait préféré raconter des conneries sur internet ».
Bien sûr, Breivik admire en secret Bachar, Kadhafi et Saddam, qui ont su selon lui (et selon Jean-Pierre Filiu aussi) confisquer les aspirations légitimes des peuples arabes à l’autodétermination et les mettre à genoux, voire carrément par terre, pour assouvir leurs propres appétits.
Mais dans ce coin reculé du Multivers, ça ne porte pas à conséquence, et il peut se monter le bourrichon avec ses petits copains de la fachosphère en discutant de Kirkegaard sur des forums de téléchargement illégal de philosophes vérolés tout en mangeant du saucisson halal en slip, car c'est aussi ça la magie du virtuel, sans que la violence générée sur les réseaux sociaux ait une incidence dans le réel.
Et les jeunes travaillistes peuvent continuer à tenir leur Université d'été sur l'ile d'Utøya, en forme de coeur, sans s'y faire trouer la peau comme des jeunes travaillistes lapins à la fête foraine.
Il faut juste développer une bonne tolérance aux discours de Jean-Lük Mélenchønberg.

 

Utøya, Jeudi 12. (la veille)


(à suivre)